Une étude récemment publiée par l’Observatoire des conditions de travail et de l’ergostressie (OBERGO), met en garde les salariés contre les « illusions dangereuses » qui entourent le télétravail. L’enquête constate que si les salariés télétravailleurs bénéficient pour la plupart d’une amélioration de leur qualité de vie, ce mode de travail n’est pas pour autant adapté à tout type de profil.
A l’heure où se multiplient les discours et les rapports officiels en faveur du télétravail (amélioration de la qualité de vie des salariés, meilleure insertion des handicapés, ou encore solution aux économies d’énergie), une étude intitulée «Télétravail, rêvé, rejeté, réel ? Halte aux illusions dangereuses » et publiée par l’OBERGO le 6 juin 2010, met en garde contre les illusions « qui tendent à faire croire que cette organisation est bonne pour tous les salariés et toutes les entreprises». En effet, si la plupart des salariés fonctionnant sur le mode du télétravail notent de fortes améliorations, notamment en ce qui concerne leur qualité de vie, ces profils sont néanmoins ceux de télétravailleurs « volontaires à 100% » , rappelle l’enquête. Or, tous les salariés ne le sont pas, ni ne peuvent pas réunir les conditions nécessaires à ce mode de travail.
Moins de stress, mais plus de travail
Pour les télétravailleurs interrogés, les avantages sont cependant nombreux. Tous constatent une meilleure qualité et productivité liées à une amélioration de leurs conditions de travail. Une juriste avoue ainsi avoir doublé son chiffre d’affaire en 2 ans en télétravaillant 1 jour par semaine. « Les résultats pour la société sont meilleurs et tout le monde a été gagnant » , explique-t-elle. De même, concernant leur qualité de vie, 8 télétravailleurs sur 10 se disent moins fatigués et moins stressés, notamment par les transports. Une responsable de formation témoigne : « je gagne 4h/jour sur les transports, j’économise une fatigue nerveuse et du stress. Je récupère énormément d’efficacité, de sérénité» . Parmi les autres avantages que reconnait l’enquête au télétravail : la souplesse et la liberté de gestion de son temps. «Je vais chercher mes enfants à l’école, je m’organise pour les ramener à la maison à une heure décente ; Pour les rendez-vous médicaux ou autres, ça simplifie les choses, avant je prenais des RTT » , explique une autre femme interrogée. Les télétravailleurs auraient donc plus de temps à consacrer à leurs activités (sport, vie associative, vie familiale…), à condition toutefois de bien s’organiser.
En revanche, pour 1 télétravailleur sur 3, le temps et la charge de travail ont augmenté avec le télétravail. Selon l’étude, la charge de travail serait en effet plus lourde, comme l’explique un travailleur. « Je ne travaille pas plus tôt le matin, mais beaucoup plus tard le soir, et les journées télétravaillées sont plus denses, l’investissement est plus fort ».
Des profils peu répandus
Mais la principale mise en garde sur le télétravail réside dans le fait que tous les salariés ne peuvent pas réunir les conditions nécessaires à ce mode de fonctionnement. En effet, la réussite du télétravail exige des profils de salariés très spécifiques et peu répandus, souligne le rapport. Il faut par exemple aimer travailler seul, loin du collectif de travail et supporter l’absence physique de ses collègues et de sa hiérarchie. Par ailleurs, le télétravailleur doit disposer d’un logement compatible à ce type d’activité et faire preuve d’une grande autonomie.
La réussite du télétravail passe également par la signature d’un contrat sérieux, d’un rapport de confiance très grand avec l’entreprise, mais demande surtout d’occuper un emploi pour lequel la présence physique du salarié n’est pas obligatoire pour la bonne marche de l’entreprise.
Enfin, l’enquête pointe du doigt les discours qui accompagnent les restructurations d’entreprises à l’occasion desquelles est proposé aux salariés le choix entre mobilité géographique, télétravail et licenciement, dont la conséquence est alors un télétravail « subi ». Au final, le bilan est clair : les salariés ne possédant pas le profil adéquat, risquent bien souvent de se retrouver exclus.
* Cette enquête a été réalisée par l’OBERGO, avec l’appui de la CFDT Cadres et de l’Observatoire Des Cadres, auprès des télétravailleuses et des télétravailleurs, d’octobre 2009 à avril 2010.
Marie Bernard